1979-2019, 40 ans d'existence et 41ème
édition de la fabuleuse Classique Internationale Marseille-Cassis.
2008-2019, 11 ans de participation et
ma 12ème édition à cette course qui est de loin ma préférée.
C'est la seconde fois que je vais la
faire en étant bien blessé, mais je suis incapable de me résoudre
à en louper une. Depuis le 1er septembre, aucun entraînement. La
seule fois où j'ai chaussé mes running c'était le 13 octobre lors
d'un trail où il m'était impossible de repousser l'invitation de
mon ami organisateur. Donc en deux mois c'est plus que léger. Je
sais que je vais être dans le mal mais deux objectifs s'offrent à
moi :
- le premier sera de terminer même en
marchant, en rampant, en roulant en boule, ...
- le second sera de battre mon moins
bon chrono qui est à des années lumières de toutes mes autres
éditions à savoir 2h08'44'' (2009, avec une méga géante entorse
de la cheville). Julie va faire son baptême
''Marseille-Cassis''. Bien content de partager ma course préférée
avec ma chérie. Mon fils Lucas est aussi du voyage. Pas comme
coureur mais en qualité de supporter. Nous allons profiter de la
course pour faire un week-end de quatre jours à Marseille où nous
avons réservé un appartement dans le 3ème arrondissement. Comme
nous prenons le TGV pour y aller, les transports seront soit en
commun soit avec nos petites pattes.
Revenons à la course où 20 000
participants s'élanceront du boulevard Michelet après avoir accédé
au départ en traversant le Stade Vélodrome qui est prévu pour la
première vague à 9h00. Ça va, nous passons en heure d'hiver dans
la nuit de samedi à dimanche donc on aura une heure de dodo en plus.
Plusieurs sas sont mis en place : -1h20, -1h30, -1h45 et ''grand
public''. Les trois premiers partent à 9h00 et le dernier en vague
de 3000 coureurs toutes les 4 minutes afin de fluidifier les premiers
kilomètres. Mon pote Bernard sera une fois de plus au rendez-vous
mais ne partira pas avec nous. En effet, nous nous sommes mis dans le
sas -1h45 tandis que Bernard sera dans le ''grand public''. Trois
ravitaillements seront implantés sur le parcours (sans compter celui
de l'arrivée) : 5ème km au rond-point de Luminy, 10ème km au
Col de la Gineste et au 15ème km au Bois Joli.
Le retrait des dossards s'effectue
vendredi (10h00/20h30) et samedi (9h00/20h00) au hall 8 du parc des
expositions Chanot où un village expo attend les coureurs. Sans
oublier le traditionnel repas du samedi midi qu'on a instauré avec
Bernard depuis qu'on court ensemble ici. Ça permet de passer un bon
moment en famille et entre amis. Habituellement le restaurant choisi
se trouve du côté de la place aux Huiles non loin du Vieux Port.
Voilà pour la présentation de ce 41ème Marseille-Cassis !
Nous sommes donc bien arrivés jeudi en
gare de Marseille Saint-Charles … à l'heure ! Eh oui tout est
possible avec la SNCF, même d'arriver en avance. Après avoir pris
un bon repas à la Pizzeria ''Chez Angèle'' (50 rue Caisserie,
Marseille 3ème) puis être entrés en possession de notre
appartement, nous avons effectué une jolie et longue marche qui nous
a conduit jusqu'au Fort de Notre-Dame de la Garde sous un ciel un peu
nuageux au début mais qui s'est totalement dégagé par la suite.
Vendredi nous sommes allés
retirer nos dossards au Parc Chanot. On nous a attribué les numéros 2832 (Julie) et 2833 (moi). Pas de chance pour ma chérie qui aime les numéros
impairs. On nous a remis de jolis tee-shirts techniques en guise de
cadeau (violet pour les hommes et bleu clair pour les femmes). Nous avons
ensuite flâné dans les allées du salon où équipementiers,
organisateurs de courses ou encore institutions se sont installés.
Une magnifique rétrospective avec les tee-shirts des différentes
éditions ou encore avec l'exposition de jolies aquarelles retraçant
les 40 premières éditions de Marseille-Cassis. Ensuite après avoir
pris notre repas au ''Big Fernand'' (41 boulevard Michelet, Marseille
8ème), petite balade devant le Stade Vélodrome (Allleeeeeeeeeez
l'OM), à la plage du Prado et au Parc Borély.
Samedi midi, après avoir traversé
le Vieux Port à bord du fameux ''Ferry Boat'' (prononcez BOATTE),
nous avons retrouvé nos amis Bernard et Lysbeth sur la place aux
Huiles pour aller déjeuner ensemble. Ils arrivent fraîchement de
Cagnes-sur-Mer, ce qui fait moins de route que nous. Il y a tellement
de restaurants par ici qu'il nous est difficile de faire un choix.
Nous avons fini par opter pour l'ESQUINADE (38 place Thiers, 1er
arrondissement) où nous avons passé un très bon moment ensemble.
En ce dimanche, c'est jour de course.
Nous quittons notre logement un peu avant 7 heures afin d'aller en
métro déposer nos sacs dans une bagagerie non loin du boulevard
Michelet où le départ de la course va être donné. Nous retrouvons
ensuite Bernard devant les camions-vestiaires boulevard Teisseire.
Coup de chance, on tombe très rapidement sur lui. Derniers
préparatifs : grand sac poubelle ou pas grand sac poubelle pour
se protéger de la fraîcheur en attendant le départ ? Ce sera
sans finalement.
Passage ensuite par la sécurité avant
de pénétrer dans le stade Vélodrome. Tout d'abord sous les travées
où les futurs coureurs se sont massés pour satisfaire un dernier
besoin et remplir leurs gourdes. Nous passons ensuite au pied des
tribunes dans l'enceinte même du stade pour mon plus grand bonheur.
Nous en profitons pour prendre quelques photos. Malgré le monde
qu'il y a, je tombe sur Antoine, un copain de région parisienne qui
est bien meilleur que moi et qui va bien s'éclater sur cette course.
Il est maintenant l'heure de quitter
Bernard qui doit prendre le chemin du sas ''grand public'', alors que
Julie et moi prenons la direction de celui des ''1h45''. Déjà
beaucoup de coureurs se sont placés derrière l'immense arche de
départ bleue. L'organisation est telle que l'attente est rendue très
courte.
A 9 heures pile le coup de pistolet
retentit. Les élites et les autres sas sauf celui ''grand public''
prennent le départ en même temps. On marche pratiquement jusqu'à
l'arche. Ça y est, nous pouvons courir ! Julie passe le tapis
de chronométrage légèrement avant moi. Mon 12ème Marseille-Cassis
est enfin lancé ! Nous passons devant le stade Vélodrome et
l'immense peloton du sas ''grand public''. La douleur revient très
rapidement dans ma jambe gauche.
Après 500 mètres de course sur le
boulevard Michelet et étant juste devant ma chérie, je décide de
piquer complètement sur la droite, vers la contre-allée pour faire
une pause tellement j'ai mal. Mais en arrivant sur cette
contre-allée, je décide de trottiner et en voyant Julie s'éloigner,
je me force à tenter de faire avec la douleur présente. Je reste
sur le côté pendant 200 mètres avant de revenir sur la partie
principale du boulevard Michelet où je commence à grignoter mètre
après mètre derrière Julie. Je finis par revenir sur elle juste
avant l'Obélisque de Mazargues. En me concentrant pour essayer
d'occulter la douleur, je lâche Julie en poursuivant tout droit
après l'Obélisque.
Le premier kilomètre était plat puis le
suivant en montée légère. Maintenant on retrouve du plus roulant
et même une légère descente avant d'arriver à une première vraie
grimpette qui nous fait passer sous le pont de Valmante (km 4). Je ne
sais pas si les autres en chient mais moi oui. De nombreux
spectateurs se trouvant sur ce pont nous acclament.
Je suis bien
content d'arriver au rond-point suivant car même si le tracé est en
légère montée, c'est bien moins pentu que précédemment. J'arrive
au premier ravitaillement (celui du km 5) où j'attrape au vol un
gobelet de grenadine et un quartier d'orange. Victoire pour moi en
effectuant un joli lancé en cloche du reste de mon orange dans la
poubelle (lancé d'au moins … 1 mètre). Faut savoir se contenter
de petites choses quand ça ne va pas bien (lol). Au rond-point de Luminy, nous tournons
à droite. Ça monte franchement plus. Je le sens bien dans la jambe.
Mais je monte assez régulièrement. De nombreuses personnes sont sur
les trottoirs toujours pour nous encourager. Autant avant la course,
il faisait frais, autant les rayons du soleil sont maintenant bien
chauds. Cette route avec les dernières maisons de Marseille n'est
pas simple à négocier car la pente n'est pas régulière. Un coup
ça monte fort, puis ça redevient un peu plus roulant et ça
regrimpe. Ouille ouille les guibolles ! La route tourne sur la
droite et quelques dizaines de mètres plus loin je passe sous une
banderole indiquant mon entrée dans le Parc National des Calanques,
et surtout c'est le signe du début de la véritable ascension vers
le col de la Gineste.
Serrer les dents le plus possible pour
repousser l'échéance de la marche. Pour le moment je cours (je ne
sais même pas comment j'y parviens). Je m'attends à tout moment à
ce que Julie revienne sur moi. Mon but est simple : arriver en
haut sans marcher. Les années précédentes ça se passait
relativement bien, voire très bien, mais là … c'était
malheureusement prévu. Plus on monte, plus le spectacle offert par
le paysage est magnifique. Au gré des virages, on voit Marseille de
plus en plus petite, les quelques îles se dessiner dans la
Méditerranée et surtout la roche calcaire tout autour de nous et la
végétation qui se raréfie de plus en plus. Il ne faut pas oublier
de remercier les spectateurs montés tôt dans la matinée pour nous
encourager et qui se trouvent surtout dans les virages. Km 8 puis km
9, je cours toujours. Plus qu'un kilomètre dont 500 mètres bien
pentus. A part ça, la montée de la Gineste est longue, raide mais
surtout régulière. Plus que 400 mètres. Je profite, voire je
jubile. Une petite victoire d'être arrivé au sommet sans marcher.
Je me dis que la descente sera plus facile …
Erreur ! Mais avant de m'en rendre
compte, je passe à côté de la borne matérialisant le col de la
Gineste (327 mètres) puis du second ravito où je prends une petite
bouteille d'eau. Je passe juste après sous la petite arche du km 10
en 59'25''. Julie passera un peu après moi (1h03'02'') puis ce sera
au tour de Bernard (1h06'02''). Antoine, lui, est passé loin devant
en 42'40''. Je m'engage ensuite dans la descente et très rapidement
je me rends compte que la douleur est encore plus vive dans ce sens.
La position du corps en descente me fait encore plus mal. Du coup, le
premier kilomètre de descente s'effectue en 5'15''. Galère.
Mais la
pente me permet d'allonger la foulée (ce qui me fait moins de
contact au sol avec la jambe gauche sans pour cela aller vite). Je
commence à croiser un coureur par-ci, un coureur par-là, allongés
au sol, se faisant secourir soit par les marins-pompiers de
Marseille, soit par des secouristes ou encore des coureurs. Les
dégâts sur les corps commencent à apparaître en même tant que la
chaleur s'accentue.
Le flot de coureurs continue de
déferler vers le plateau de Carpiagne mais avant d'y arriver, il y a
une petite remontée (en plein milieu de la descente) qu'il faut
négocier. Pas facile pour moi mais bien content d'arriver en haut.
Ensuite, place à un faux-plat descendant avec passage au km 12 puis
au 13. Beaucoup de monde s'est massé sur le plateau de Carpiagne qui
abrite une zone militaire. Un faux-plat montant nous amène jusqu'à
l'hôtel du Bois-Joli qui est le seul bâtiment des environs. Une
fois en haut, je passe sous l'arche des 15 kilomètres en 1h27'58'',
loin derrière Antoine (1h01'53''). Julie se rapproche de moi
(1h30'28'') tandis que Bernard perd un peu de terrain (1h36'17'').
Juste après ce passage au 15ème
kilomètre, un coureur torse nu lance sa bouteille d'eau vide au sol
alors que depuis le début le nombre de déchets par terre est plus
que limité. Les coureurs ont parfaitement respecté les consignes en
laissant leurs déchets soit dans les bennes placées après les
ravitos soit au sol dans les zones dédiées. Mais là, le mec n'en a
rien à faire de la nature et jette sa bouteille sur le bas-côté.
Un autre coureur (bien carré), lui gueule littéralement dessus, lui
intimant de remonter pour aller chercher sa bouteille, sous les
applaudissements des autres concurrents. Pas fier le mec torse nu !
Tout ça pour dire qu'à par quelques exceptions, les sportifs du
Marseille-Cassis ont été respectueux de l'environnement. Ça
descend maintenant très fort. La plage de Cassis est visible tout en
bas. Mais depuis plusieurs années elle n'est plus le lieu de
l'arrivée.
Je descends assez lentement avec le
quartier Bellevue juché sur la rocaille à ma gauche. Plus la pente
s'accentue plus la route serpente. On a l'impression qu'on va se
jeter dans la mer par moment même si elle est bien loin. Il y a de
plus en plus de groupes de musiciens et la foule grossit à vue
d’œil. Je sais que malgré cette insupportable douleur je vais
réussir à aller au bout maintenant. Même à cloche-pied s'il le
faut.
Passage au km 17 où le brouhaha est impressionnant. Vive le
Tour de France. Ah non, nous sommes sur le MK6 (Marseille-Cassis).
Quel pied ! Nous tournons à gauche (contrairement à avant où
nous prenions légèrement sur la droite en direction de la plage)
avenue Carnoux où ça descend encore mais 100 mètres plus loin, ça
devient plat et lorsque la route tourne d'elle-même sur la droite en
longeant le parking des Gorguettes, on reprend un peu d'altitude. Je
n'ai pas marché une seule seconde depuis le départ de la course (ce
qui est un exploit pour ma condition) et pile poil au km 17,5, juste
à l'endroit où se trouve mon fils (que je n'avais pas vu), je
craque. Je ne peux plus courir.
Je dois marcher et dès que je
l'entends m'encourager, j'essaye de relancer ma course mais c'est
très compliqué et trop douloureux. Alors je marche jusqu'en haut
avant de reprendre la course dès qu'on tourne à droite sur le
chemin du plan d'Olive qui est une petite route étroite traversant
les vignes. Cette route est en mauvais état mais surtout elle
n'arrête pas de monter et descendre (montées et descentes légères
mais trop difficiles pour moi). J'entends Julie m'encourager. Elle
est revenue à mes côtés et passe devant moi. Il ne reste qu'un
kilomètre et demi de course alors je décide de serrer les dents
pour emboîter sa foulée mais je ne peux pas. La jambe est en feu
(un incendie permanent depuis le début à Marseille). Après une
dizaine de mètres de marche, alors que Julie est une vingtaine de
mètres devant moi, je reprends la course et je ne vais plus
m'arrêter jusqu'à l'arrivée. Mais qu'est-ce que j'en ch** !
La route tourne à droite. Juste au panneau du km 19, un nouveau
coureur est allongé au sol en train de se faire secourir. Je n'ai
pas compté le nombre de personnes en détresse mais c'est
impressionnant. Puis ça remonte sec sur la gauche jusqu'à la gare
de Cassis. Julie fait cette montée en marchant, ce qui me permet de
revenir à sa hauteur.
Elle va maintenant rester avec moi jusqu'à la
fin. La descente qui suit ne me permet pas d'aller super vite mais
surtout d'avoir moins d'appui au sol. Virage à droite. Nous arrivons
au début de l'avenue des Albizzi pour les 400 derniers mètres de la
course. Les panneaux d'indication me permettent d'avancer (300m,
250m, 200m, 150m). L'arche d'arrivée et le tapis rouge nous tendent
les bras. Je franchis la ligne d'arrivée à côté de ma chérie
7623ème/18211 en 1h57'58'' (Julie est 7630ème en 1h57'59''). Put***
c'est bon je l'ai fait !!!
Il faut que je marche pour évacuer au
maximum cette douleur. Ça tombe bien car nous devons remonter (la
rue est plate) toute l'avenue des Albizzi jusqu'au rond-point de la
route de Marseille qui est bien longue. Au cours de cette traversée,
nous récupérons notre jolie médaille souvenir du 40ème
anniversaire de la course, ainsi qu'un sac contenant du
ravitaillement, ou encore des bananes et des petites bouteilles
d'eau. Je tombe sur David, un copain qui a battu très récemment son
record sur marathon. Il a terminé aujourd'hui la course en 1h48''.
Bravo à lui !
Nous suivons le cheminement qui nous
conduit jusqu'aux camions-vestiaires. Plus particulièrement au
numéro 6 où se trouvent nos sacs. Dès qu'on les a récupérés, on
monte sur la petite allée voisine, où tous les ans on se change
plus tranquillement. C'est à cet endroit que Bernard (qui connaît
aussi l'endroit), nous retrouve quelques minutes plus tard.
Au niveau du classement ça donne
ceci :
7623ème/18211 en 1h57'58'' Jeff
BACQUET (PAAC)
7630ème/18211 en 1h57'59'' Julie
FROUCHT (PAAC)
10072ème/18211 en 2h05'00'' Bernard
LEFEVRE (ASPTT Nice)
Il ne nous reste plus qu'à monter à
bord d'une des navettes qui va nous ramener dans la bonne humeur
avenue du Prado à Marseille. Avant de reprendre le TGV Ouigo en
direction de la région parisienne et de ses températures
sibériennes... nous allons nous restaurer chez Big Fernand (plus que
mérité) puis détente et trempette sur la plage du Prado.
Rendez-vous l'année prochaine pour mon 13e MK6 !